Expulser une famille d’un squat sans en considérer l’impact sur celle-ci viole le droit à un logement prévu par le pacte de l’ONU sur les droits sociaux

Expulser une famille d’un logement, occupé sans titre juridique, sans avoir considéré l’impact disproportionné que cette expulsion pourrait avoir sur cette famille, les meilleurs intérêts de l’enfant et sans respecter les garanties procédurales d’une consultation appropriée et authentique, constitue une violation du droit à un logement suffisant prévu par l’article 11(1) du pacte sur les droits économiques, sociaux et culturels de l’ONU. C’est ce qu’a estimé le comité de l’ONU compétent pour ces droits, en se prononçant sur les communications (plaintes) des personnes expulsées, dans sa constatation du 16 février 2024. Le comité se réfère notamment à son commentaire général (n° 4) sur le droit à un logement suffisant, à l’engagement de chacun des États parties « au maximum de ses ressources disponibles » (art. 2(1) du Pacte), ainsi qu’à la nécessité d’accorder une protection et une assistance aussi larges que possible à la famille (art 10(1)).

L’expulsion a frappé deux familles qui s’étaient installées depuis des années en Italie. Elles ont été expulsées à la suite de l’acquisition des deux maisons par la compagnie des chemins de fer. Elles avaient demandé des logements sociaux mais l’Etat ne leur avait offert qu’un abri temporaire d’urgence qui aurait séparé les femmes des hommes.

Le comité fait aussi différentes recommandations à l’Italie et lui demande, dans les 6 mois de sa constatation du 16 février 2024, une réponse écrite sur les mesures prises à la suite de sa constatation et à ses recommandations. Il demande aussi à l’Italie de distribuer largement sa constatation, de manière à ce qu’elle atteigne tous les secteurs de la population.

Le comité de l’ONU rejoint ainsi la Cour européenne des droits de l’homme dans sa jurisprudence mentionnée dans l’index sous Logement / expulsion, et en particulier son arrêt Winterstein, affaire dans laquelle le comité juridique d’ATD Quart Monde avait invoqué le principe de proportionnalité. La Cour y a fait suite, en reprochant à la France de ne pas avoir fait un examen de proportionnalité avant l’expulsion.

Pour consulter l’examen de l’affaire et les recommandations du comité de l’ONU, cliquez sur le lien suivant : tbinternet.ohchr.org/_layouts/15/treatybodyexternal/Download.aspx?symbolno=E%2FC.12%2F75%2FD%2F226%2F2021&Lang=en

Jean-Marie Visée

Membre du Comité juridique européen

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Expulser une famille de son logement sans lui offrir une solution complète de relogement viole le droit au respect du domicile.

Les autorités bulgares avaient ordonné la démolition du bâtiment où une mère vivait avec ses enfants, pour infraction aux règles d’urbanisme. Ce bâtiment construit à des fins agricoles et utilisé, en violation de son permis, à des fins résidentielles, n’avait ni électricité, ni eau courante, ni système d’évacuation des eaux usées.

Après avoir épuisé les voies de recours en droit interne, la mère saisit la Cour européenne des droits de l’homme car elle estime que le droit au respect de son domicile, protégé par l’article 8 de la Convention, a été violé.

La Cour constate qu’il y a eu des tentatives des autorités bulgares pour trouver une solution au problème de relogement de la requérante. Cependant, ces tentatives n’ont pas eu lieu dans le cadre d’une procédure formelle impliquant un examen complet de la proportionnalité de l’ingérence à la lumière des circonstances individuelles de la requérante, conformément à la jurisprudence de la Cour (Buckland c. Royaume-Uni, no. 40060/08, §§ 67-68, 18 septembre 2012 ; Yordanova et autres c. Bulgarie, no. 25446/06, § 136, 24 avril 2012 ; Ivanova et Cherkezov c. Bulgarie, no. 46577/15, § 60, 21 avril 2016). En outre, il n’apparaît pas que les autorités aient proposé à la requérante une solution complète : leur seule proposition concrète semble avoir été de placer temporairement ses enfants dans des logements gérés par les services sociaux.

La Cour conclut à la violation du droit au respect du domicile. Cet arrêt a été rendu, à l’unanimité, le 11 avril 2023 dans l’affaire Simonova c/Bulgarie (no 30782/16). Il accorde 4.500 euros à la requérante.

 

Jean-Marie Visée

Membre du Comité juridique européen

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23 revendications en vue de réformer la loi belge du 26 mai 2002 ‘concernant le droit à l’intégration sociale’

En ce début d’année 2023, le mouvement ATD Quart Monde Belgique a cosigné avec d’autres associations un mémorandum comportant 23 revendications en vue de réformer la loi belge du 26 mai 2002 ‘concernant le droit à l’intégration sociale’. L’objectif est que la législation de l’aide sociale soit plus juste (en particulier, moins conditionnalisée) et que son application par les centres publics d’action sociale communaux ne diffère pas selon le lieu de résidence des bénéficiaires.

Les 23 revendications listées ci-après sont détaillées sur le site de la Ligue des droits humains : https://www.liguedh.be/voeux-de-reforme-de-la-loi-concernant-le-droit-a-lintegration-sociale/

Certaines revendications sont moins exigeantes que celles soutenues habituellement par ATD mais cela ne signifie pas que le mouvement ATD renoncerait à ses propres revendications. Ainsi, en ce qui concerne le statut de cohabitant (revendication n° 6), ATD continue évidemment d’exiger sa suppression ! (1)

Liste des revendications

  1. Éviter l’usage des circulaires.
  2. Informer et conseiller les assurés sociaux
  3. Assurer le revenu à toute personne majeure.
  4. Étendre le droit à l’intégration sociale aux demandeurs d’asile et aux étrangers non-inscrits au registre de la population et aux personnes qui purgent leur peine de prison extra muros.
  5. Exonérer totalement les allocations familiales.
  6. Tenir compte de façon limitée des ressources d’un cohabitant avec ses ascendants ou ses descendants majeurs.
  7. Limiter le recours aux débiteurs alimentaires pour permettre l’individualisation des droits.
  8. Clarifier et réformer la procédure d’examen de la demande.
  9. Limiter l’enquête sur les ressources aux revenus.
  10. Calculer le revenu d’intégration sur la base du mois qui précède, sur base d’un paiement unique, mensuel, au plus tard le dernier jour ouvrable du mois, et sur un compte bancaire.
  11. Contraindre les CPAS à promouvoir un accompagnement professionnel et social pour les personnes volontaires dans le cadre de l’évaluation de la notion de disposition au travail qui doit elle-même être revue.
  12. Supprimer le projet individualisé d’intégration sociale (PIIS).
  13. Évaluer dans chaque région le système des contrats de travail « article 60 » et réformer le système en fonction de cette évaluation.
  14. Toujours vérifier les raisons de santé du bénéficiaire avant de décider de la suspension du revenu d’intégration, en ne demandant que les certificats nécessaires pour attester l’existence de raisons de santé et leur impact sur la disposition au travail.
  15. Revoir le calcul de la prise en compte de l’épargne quand il n’entre pas dans les ressources exonérées, indexer le montant de l’épargne et prévoir un plafond en dessous duquel l’allocataire ne doit pas justifier les dépenses.
  16. Définir le caractère (ir)régulier d’un don et exonérer les montants minimes irréguliers des débiteurs alimentaires ; ou de préférence les faire glisser dans la catégorie des ressources constituant une épargne (et non comme des revenus déductibles en soi), puisque ces sommes sont déjà considérées comme venant s’ajouter aux revenus strictement nécessaires (subsidiairement au point 15).
  17. Simplifier et revaloriser les montants issus de revenus du travail qui sont immunisés dans le calcul du revenu d’intégration.
  18. Ne plus prendre en compte les loyers « économisés » ou, de manière subsidiaire, prévoir une prise en compte forfaitaire moins variable et moins pénalisante pour l’allocataire.
  19. Exonérer le revenu cadastral, du moins lorsque le logement est occupé à titre de résidence principale.
  20. Mieux alimenter et faire suivre d’effet les rapports d’inspection du SPP Intégration Sociale.
  21. Respecter le système d’octroi des aides urgentes et l’améliorer.
  22. Respecter la procédure en matière de récupération et l’améliorer.
  23. Redéfinir les règles encadrant les cessions de biens et ne plus s’intéresser aux cessions de bien rétroactivement.

(1) Concernant l’exigence d’ATD de supprimer le statut de cohabitant dans la réglementation de la sécurité sociale et de l’aide sociale, voyez notamment la participation d’ATD Quart Monde Belgique à la consultation citoyenne « Un pays pour demain »

 

Philippe Brouwers

Membre du Comité juridique d’ATD Quart Monde Belgique

 

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L’application consternante de la Charte sociale européenne par le Royaume-Uni

Dans l’article suivant (Ewing, K. D. (2022). The ‘manifestation’ of social rights and the marginalisation of the European Social Charter in the United Kingdom de la Lex Social, Revista De Derechos Sociales, 12(2),1–27.), le professeur de droit établit une critique virulente de l’application déficiente de la Charte par le Royaume-Uni, ses cours et tribunaux et l’insuffisant intérêt du Parlement pour ce traité, malgré les engagements politiques antérieurs, y compris l’accord avec l’Union européenne sur le Brexit.

Est reproduit ci-dessous un très large extrait des conclusions de l’étude du professeur Ewing :

« In evidence to the JCHR (Joint Committee on Human Rights of both Houses of Parliament) in relation to the Trade Union Bill 2015, John Hendy QC and I drew attention to the Social Charter and wrote that the ‘United Kingdom’s historic record of non-compliance with this instrument (ratified by a Conservative government in 1962) is shocking, and the continuing indifference to the legal obligations it contains is alarming’. These words still ring true today:

    • The United Kingdom has failed to ratify any substantive protocol since 1962, and now accepts only 59 of the Charter’s 72 paragraphs;
    • The British government has been found to be in conformity with less than a half of the Social Charter’s paragraphs which it has accepted;
    • The British government has failed to honour a commitment to Parliament made in 2004 that it will ratify the Revised Social Charter;
    • The British government does not permit Collective Complaints to the European Committee of Social Rights;
    • The British courts have marginalized the Social Charter, and the ECtHR appears now to be doing the same in British cases;
    • The British government has sought actively to undermine the authority of the European Committee of Social Rights;
    • The British Parliament’s human rights committee (JCHR) does not take the Social Charter seriously and rarely refers to it; and
    • The United Kingdom has recently given notice of its intention no longer to be bound by a previously accepted paragraph, undoubtedly a regressive step.

These are problems that pre-date Brexit, though Brexit is unlikely to help.

(…) It ought to be said that the political and legal failings addressed above stand in sharp contrast to the active engagement of British-based or one time British-based scholars who have approached the Social Charter from multiple dimensions. One group has come to the Social Charter from what might be described as a human rights perspective (Churchill and Khaliq, Cullen, Harris, Noland, O’Cinneide); a second has approached it from what might be described as a labour law perspective (Kahn-Freund, Novitz, and O’Higgins); while more recently a third dimension has been opened up, with the examination of the Social Charter from an EU Law perspective (Khaliq). These and other scholars have produced a rich blend of published work which has done much to ensure that the Social Charter is a living instrument reflecting timeless values, and not simply a ‘manifestation’ of or a monument to Keynesian economics and Cold War politics. It is a matter of great regret that the inspiring example of this scholarship has not been matched by the commitment of decision-makers, particularly at a time when –primarily because of the consequences of economic liberalism –the need for the Foreign Secretary’s ‘manifestation’ to be realized in practice has never been more acute. »

Pour prendre connaissance de l’article complet: https://doi.org/10.46661/lexsocial.7367

 

François Vandamme
Membre du Comité juridique d’ATD Quart Monde Belgique

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Le Protocole n° 16 à la CEDH entre en vigueur le 01/03/2023 en ce qui concerne la Belgique

Le Protocole n° 16 à la CEDH entre en vigueur le 1er mars 2023 en ce qui concerne la Belgique, à la suite de la publication de la loi du 30 octobre 2022 qui y porte assentiment.

À partir de cette date, les trois juridictions suprêmes du pays (la Cour constitutionnelle, la Cour de cassation et le Conseil d’État) pourront adresser à la Cour européenne des droits de l’homme « des demandes d’avis consultatifs sur des questions de principe relatives à l’interprétation ou à l’application des droits et libertés définis par la Convention ou ses protocoles » (art. 1, paragraphe 1, du Protocole) dans le cadre des affaires pendantes devant elles (art. 1, paragraphe 2, du Protocole)

L’avis consultatif est rendu par la Grande Chambre (art. 2, paragraphe 2, du Protocole) et est motivé (art. 4, paragraphe 1, du Protocole). Il n’est pas contraignant (art. 5 du Protocole).

Le Protocole n° 16 lie déjà plusieurs autres États de l’Union européenne :

    • depuis le 01/08/2018, l’Estonie, la Finlande, la France, la Lituanie, la Slovénie ;
    • depuis le 01/06/2019, les Pays-Bas ;
    • depuis le 01/08/2019, la Grèce ;
    • depuis le 01/09/2020, le Luxembourg ;
    • depuis le 01/04/2020, la Slovaquie ;
    • depuis le 01/01/2023, la Roumanie.

Pour en savoir plus sur le Protocole n° 16, voici quelques ressources disponibles en consultation libre sur internet :

 

Philippe Brouwers

Membre du Comité juridique d’ATD Quart Monde Belgique

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CEDH : mesure provisoire pour un demandeur de protection internationale laissé à la rue

Dans l’affaire Camara c. Belgique (requête no 49255/22), la Cour européenne des droits de l’homme a décidé le 31 octobre 2022 d’appliquer une mesure provisoire pour un demandeur de protection internationale, sans hébergement depuis son arrivée, et d’enjoindre à l’État belge d’exécuter l’ordonnance rendue par le tribunal du travail le 22 juillet 2022, c’est-à-dire de fournir au requérant un hébergement et une assistance matérielle pour faire face à ses besoins élémentaires.

Le demandeur a invoqué l’art. 3 (traitement dégradant), l’art. 6 (procès équitable) combiné avec l’art. 13 (droit à un recours effectif) pour non-exécution de l’ordonnance du tribunal du travail et l’art. 8 (vie privée) pour atteinte à son intégrité physique.

Les mesures provisoires sont exceptionnelles car prises seulement lorsque les requérants seraient exposés – en l’absence de telles mesures – à un risque réel de dommages irréparables (art. 39 du règlement de la Cour). Elles ne préjugent pas de ses décisions ultérieures sur la recevabilité ou sur le fond des affaires.

Dans un arrêt du 7 juillet 2015 commenté sur ce blog, la CEDH a déjà condamné la Belgique pour traitement dégradant d’une famille de demandeurs d’asile à la rue avec un nourrisson et un enfant gravement handicapé.

Bien qu’il y ait des différences entre les deux affaires (personne seule/famille avec des enfants en bas âge ; demande de protection internationale /demande d’asile), on peut penser que la Cour conclura aussi au traitement dégradant, voire à la violation du droit à un recours effectif, compte tenu du nombre actuel de situations comparables en Belgique.

Jean-Marie Visée

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Placement : maintien du lien entre parents et enfants dans la jurisprudence de la CEDH

Le Service de lutte contre la pauvreté a publié en 2021 un cahier de jurisprudence concernant le maintien du lien entre parents et enfants lors d’un placement.

Cette étude détaillée a été synthétisée dans un article publié en 2022 dans le Journal du Droit des Jeunes.

Vous pouvez consulter ces documents via les hyperliens suivants :

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Quelles ressources juridiques consulter pour mieux utiliser le droit contre la précarité et l’exclusion sociale ?

Lorsque nous voulons utiliser le droit comme outil contre la précarité et l’exclusion sociale, nous sommes amenés à inventorier les ressources disponibles : sites internet, livres, revues, articles…

Dans le paysage juridique belge, voici quelques portes d’accès dont la liste pourra être complétée au fil du temps par le comité de rédaction et nos lecteurs. À cette fin, nous invitons d’ailleurs nos lecteurs à nous communiquer toute référence utile qu’ils consultent dans leur propre ordre juridique.

Parmi les sites internet, pointons celui du Service de lutte contre la pauvreté, la précarité et l’exclusion sociale et les rubriques suivantes :

En ce qui concerne les livres publiés depuis 2020, relevons l’ouvrage collectif intitulé « Le droit face aux pauvres » disponible en version papier et électronique, dont la table des matières peut être consultée ici. Ce livre rassemble les contributions présentées lors d’une journée d’étude à la Cour constitutionnelle de Belgique à l’occasion de l’accession à l’honorariat du juge Jean-Paul Snappe. La volonté de celui-ci est de fournir ainsi un outil de référence, de réflexion et d’action, permettant aux juristes et non juristes « de faire du droit un instrument au service des plus démunis » (M.-F. Rigaux, Introduction, p. 14).

Quant aux revues juridiques, dans le prolongement de la journée d’étude précitée, est née en 2021 la revue « Droits fondamentaux et pauvreté ». Cette revue existe exclusivement en ligne, est gratuite et en accès libre. Elle a pour objet l’examen des droits des personnes démunies dans des matières  telles que les droits fondamentaux, la sécurité sociale, l’aide sociale, l’aide juridique, l’aide aux familles, les soins de santé, la politique de logement, la politique migratoire, la culture, la lutte contre la pauvreté aux niveaux national et international. Selon sa charte des valeurs, cette revue « constitue une plateforme juridique rassemblant :

– des décisions de justice (rendues par la Cour constitutionnelle, le Conseil d’État, toutes les juridictions judiciaires, du juge de paix à la Cour de cassation, la Cour européenne des droits de l’homme et la Cour de justice de l’Union européenne) et des décisions des organes de surveillance de l’Union européenne et du Conseil de l’Europe intéressantes portant sur les droits des pauvres ;

– des études doctrinales de qualité (commentaires de décisions, études thématiques) ; et

– une veille législative et réglementaire et, le cas échéant, des commentaires critiques sur des règles de droit adoptées dans ces matières. »

 

Philippe Brouwers

Membre du Comité de rédaction

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L’hostilité envers les pauvres (« aporofobia » ou pauvrophobie) et l’exclusion sociale sont réprimées pénalement en Espagne.

En Espagne, l’hostilité envers les pauvres (« aporofobia » ou pauvrophobie) et l’exclusion sociale sont sanctionnées pénalement par la loi 8/2021 du 4 juin, publiée le 5 juin au B.O.E. et entrée en vigueur le 25 juin.

Le préambule de cette loi se réfère à l’art. 21 de la Charte des droits fondamentaux de l’U.E. Cet article interdit toute discrimination fondée notamment sur « les origines sociales », à l’instar de l’art. 14 de la C.E.D.H.

Le comportement incriminé implique le rejet, l’aversion ou le mépris des pauvres[1], précise le préambule.

L’insertion dans le code pénal se fait dans 4 articles portant respectivement sur la définition des circonstances aggravantes, l’emploi privé ou public, l’exercice des activités professionnelles et les associations.

Les circonstances aggravantes couvrent l’hostilité envers les pauvres ou l’exclusion sociale, qu’elles coïncident réellement ou non dans la victime[2] (art. 22, § 4). En d’autres termes, il y a circonstance aggravante, qu’il y ait ou non une victime identifiée.

Pour l’emploi public ou privé, en cas de discrimination grave, sont prévues des peines de prison (6 mois à 2 ans) ou des amendes si la situation d’avant n’est pas rétablie (art. 314). Exemple donné par la presse spécialisée : refuser l’accès à un service médical ou à un bar.

Des peines similaires sont prévues pour celui qui chargé d’un service public refuse à une personne une prestation à laquelle elle a droit ainsi que lorsque ces faits délictueux sont commis contre une association ou ses membres (art. 511, § 1 et 2). Pour les fonctionnaires publics, les mêmes peines sont prévues mais dans leur moitié supérieure et avec une interdiction d’exercer de 2 à 4 ans (§ 3). Cette interdiction sera de 1 à 3 ans pour les éducateurs et enseignants, proportionnellement à la gravité du délit et aux circonstances (§ 4).

Une interdiction d’exercer de 1 à 4 ans peut être aussi infligée à ceux qui, dans l’exercice de leurs activités professionnelles ou patronales, y compris dans le domaine éducatif, refusent une prestation à une personne qui y a droit (art. 512).

Sont punissables aussi les associations qui fomentent, promeuvent ou incitent directement ou indirectement à la haine, l’hostilité, la discrimination ou la violence contre les personnes, groupes ou associations pour ces raisons (art. 515).

En conclusion, il s’agit d’un arsenal législatif susceptible de dissuader les comportements qui écartent les pauvres injustement.

[1]             « la actuación delictiva subyace el rechazo, aversión o desprecio a las personas pobres ».

[2]             Se modifica la circunstancia 4.ª del artículo 22  (circunstancia agravante) , que queda redactada como sigue:

«4.ª Cometer el delito por motivos racistas, antisemitas u otra clase de discriminación referente a la ideología, religión o creencias de la víctima, la etnia, raza o nación a la que pertenezca, su sexo, edad, orientación o identidad sexual o de género, razones de género, de aporofobia o de exclusión social, la enfermedad que padezca o su discapacidad, con independencia de que tales condiciones o circunstancias concurran efectivamente en la persona sobre la que recaiga la conducta.»

 

Jean-Marie Visée

Membre du Comité juridique européen

d’ATD Quart Monde

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Une expulsion de logement en Espagne condamnée par le Comité des droits économiques, sociaux et culturels de l’ONU

Le Comité des droits économiques, sociaux et culturels de l’ONU est une institution qui relève de son Conseil économique et social.

Dans un rapport du 18 février 2021 concernant l’Espagne, le Comité condamne une expulsion de logement d’une famille nombreuse sans que des logements alternatifs appropriés aient été préalablement envisagés. Il ordonne à l’Espagne :

  • d’octroyer à la famille une réparation effective comme compensation économique des violations subies ainsi que le remboursement des coûts de la procédure devant le Comité ;
  • d’indiquer les mesures qu’elle aura prises pour se conformer au rapport du Comité, dans un délai de six mois ;
  • de rendre public le rapport du Comité et de le distribuer à tous les secteurs de la population.

El Consejo Económico y Social de Naciones Unidas reprende duramente al Estado español por desalojar de su vivienda esta familia, de origen marroquí, asentada en España desde hace 25 años, sin haber estudiado previamente las alternativas habitaciones apropiadas para la pareja y sus cuatro hijos. Además, critica que « la alternativa tampoco ofrecía una solución permanente » y considera que el Estado parte no acreditó que aquel hospedaje ofrecido a los desahuciados « constituía un paso previo a una vivienda adecuada ». El escrito informa de que « los autores se encontraban en constante amenaza de tener que dejar los hostales o albergues ofrecidos sin ni siquiera otra alternativa temporal ».

El organismo alega que « el Estado tiene la obligación de proporcionar a los autores y sus hijos una reparación efectiva, en caso de que no cuenten con una vivienda adecuada ».  Además, obliga a las instituciones correspondientes a « volver a evaluar el estado de necesidad » de la familia y otorgarles prioridad atendiendo a la antigüedad de su solicitud de vivienda a la Comunidad de Madrid « desde la fecha en que la solicitó, con el objeto de otorgarles una vivienda pública u otra medida que les permita vivir en una vivienda adecuada, tomando en cuenta los criterios establecidos ene el presente dictamen ».

También señala que se les debe otorgar a la familia « una compensación económica por las violaciones sufridas y reembolsar a los autores los costes legales que razonablemente hubieran  incurrido en la tramitación » de la petición de amparo a la ONU.

España deberá entregar en el plazo de seis meses a Naciones Unidas un plan de cumplimiento de este dictamen.

(extrait de l’article du journal Publico du 10 mars 2021, https://www.publico.es/sociedad/onu-condena-espana-violar-derecho.html)

Pour consulter le rapport du Comité, cliquez sur ce lien : https://u.pcloud.link/publink/show?code=XZ0f8WXZhn4jKBhYp986osM4MM4YH8jQ4qC7

Sur le même thème, voyez aussi ces deux contributions sur le blog :

1) Expulsions et relogement

2) ¿Puede el Tribunal de Estrasburgo parar desahucios o facilitar realojos?

 

Jean-Marie Visée

Membre du Comité juridique européen d’ATD Quart Monde

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